Pionnier des arts martiaux japonais en France, il m’a initié à la voie du sabre comme espace de vérité et de révélation. Par l’échange, le ressenti et le lâcher prise, il m’a appris à faire dialoguer le corps, l’esprit et le sabre comme un tout indissociable, au service d’une expression libre, vivante et profondément incarnée de l’art martial.
Le sabre ne ment pas : il est le prolongement direct du corps et agit comme un miroir. Il révèle sans détour notre état intérieur, notre justesse, nos tensions et nos intentions. À travers lui, la technique cesse d’être abstraite pour se matérialiser dans la lame, rendant visible ce que nous sommes réellement, avant, au moment de l’action, comme après.
J’ai découvert les arts martiaux très jeune, à travers plusieurs années de pratique du judo, qui ont posé les premières bases de ma discipline corporelle et de mon rapport à l’effort. Comme beaucoup de jeunes de ma génération, j’ai ensuite été profondément marqué par la figure emblématique de Bruce Lee, dont les films ont suscité une fascination durable pour les arts martiaux orientaux et nourri un désir sincère de m’engager dans une voie martiale.
Initialement attiré par le kung-fu, l’absence d’école accessible à proximité m’a conduit, à l’âge de douze ans, vers le karaté-dō, un choix qui s’est rapidement imposé comme une évidence et a structuré l’ensemble de mon parcours. J’ai eu la chance d’être formé pendant plus de vingt-cinq ans par Marc Degioannini sensei, dont l’enseignement rigoureux, technique et profondément ancré dans la tradition a constitué la véritable colonne vertébrale de ma construction intellectuelle et martiale.
Dans une dynamique d’ouverture d’esprit et de progression continue, et toujours avec son soutien, j’ai poursuivi en parallèle mon développement auprès de Kazuhiro Sawada Sensei, en France comme en Belgique, durant de nombreuses années. Cette trajectoire s’est également enrichie de l’enseignement de Hervé Delage Sensei au sein de plusieurs dōjō, de Jacques Fonfrede Sensei à Paris, ainsi que de Shigeru Uemura Sensei, également à Paris. Chacun, à sa manière, a contribué à affiner et approfondir ma compréhension des mécaniques martiales, enrichissant ainsi mon apprentissage du karaté JKA, tant sur les plans technique et spirituel que dans la dimension de l’engagement, de la responsabilité et de la transmission.
Ce parcours, construit dans la durée, repose sur une conviction forte que le karaté-dō n’est pas une accumulation de techniques, mais une démarche structurée, exigeante et évolutive, où la rigueur du cadre permet l’émergence de la liberté, de la justesse et à terme, de la responsabilité de transmettre.
Dans cet article je présente une esquisse du parcours de Jacques Fondrede Sensei.
Bertrand Jaillet
OSS !
Jacques FONFREDE
Jacques Fonfrede Sensei est une figure fondatrice et incontournable des arts martiaux japonais en France. Dès les années 1950, il s’engage activement dans la transmission de disciplines encore méconnues en Europe, en particulier le karaté, le kendo, le iaïdo et l’aïkido, dont il devient expert dans chacun des quatre domaines.
Disciple direct du maître Tetsuji Murakami Sensei, premier grand expert japonais à enseigner le karaté en Europe, il participe dès 1957 à l’introduction du karaté en France, à une époque où peu de structures existaient. Ensemble, ils fondent également en 1958 le premier dojo régulier de kendo à Paris, jetant les bases d’une pratique du sabre japonais qui allait s’enraciner durablement sur le territoire.
Passionné par la voie du sabre, Jacques Fonfrede Sensei consacre une grande partie de sa vie à développer le kendo, le iaïdo, mais aussi le chanbara (escrime libre japonaise), qu’il contribue à structurer en France comme une discipline à la fois pédagogique, martiale et accessible aux plus jeunes. Il devient une référence nationale dans ces disciplines.
Son action ne s’arrête pas au dojo. Il participe à la structuration institutionnelle des arts martiaux en France, en co-fondant la Fédération Française de Karaté et Arts Martiaux Affinitaires (FFKAMA), dont il devient le premier vice-président, tout en dirigeant la région Île-de-France de 1969 à 1982. Parallèlement, il s’implique au sein de la FFJDA (Fédération Française de Judo et Disciplines Associées), où il occupe les fonctions de secrétaire général du Kendo et Disciplines Associées de 2000 à 2008. Il y fonde également la Commission nationale de Chanbara, qu’il anime de 1999 à 2009, contribuant à sa reconnaissance officielle.
Jacques FONFREDE au Japon
Éducateur dans l’art du sabre, Jacques Fonfrede Sensei a formé des générations de pratiquants et d’instructeurs, transmis les valeurs du budō avec rigueur et bienveillance, et œuvré sans relâche pour le développement des disciplines martiales japonaises en France. Son enseignement a profondément influencé ses élèves, parmi lesquels Jean-Claude André et Fabien Carletto, fondateurs en 2007 de l’association Kaïshin Kaï Kendo Courbevoie, dont il assure la direction technique. Cette association a pour vocation la pratique et la promotion du kendo, du chanbara et du iaïdo, avec une approche centrée sur l'amélioration de soi à travers les arts du sabre. Depuis 2022, le club accueille également les enfants dès l’âge de 10 ans.
Aujourd’hui encore, Jacques Fonfrede Sensei est considéré comme un grand maître du kendo en France, une mémoire vivante de la construction des arts martiaux japonais dans l’Hexagone. Son héritage ne se limite pas à ses titres ou à ses fonctions : il se mesure dans la transmission fidèle, l’exemple donné, et les ponts qu’il a su bâtir entre la tradition japonaise et les générations de pratiquants français.
Voici une citation inspirante attribuée à Jacques Fonfrede, issue d’un blog de pratiquants historiques de kendo en France :
« Le principe le plus important est la mobilité du déplacement, préférant l’esquive au blocage, l’exemple qu’il citait volontiers était celui du toréador face à la charge du taureau. »
Merci beaucoup - Thank you so much - どうもありがとうございます